En pause de compétition pendant trois semaines, l’entraîneur de l’US Créteil Handball Benjamin PAVONI fait un premier point pour USCHB.fr sur le début de saison de son équipe. Interview vérité.
Benjamin, ton équipe est première avec cinq victoires et deux nuls. Comment juges-tu ce début de saison ?
Nous sommes premiers après sept journée. Ce week-end nous sommes exempts et il est possible que Mulhouse nous passe devant. Nous sommes invaincus et c’est une bonne chose. Maintenant, nous avons perdu deux points contre Mulhouse contre qui je pense que nous avons fait un non-match total, nous étions à côté de la plaque ; et contre Istres où la physionomie de match était différente, notamment cette première période qui nous a coûté le fait que l’on aurait pu être beaucoup plus ambitieux sur l’issue de cette rencontre. Malgré tout, ce match nul à Istres est une bonne chose parce que nous sommes allés le chercher.
Nous ne nous étions pas fixés de tableau de marche. Nous avons l’ambition de gagner chaque rencontre que l’on dispute.
Et d’au moins rester invaincus ?
Oui, rester invaincus. Et puis, nous avons une série de match qui nous attend d’ici à décembre et qui doit nous permettre de terminer l’année sur une bonne note. Maintenant, nous avons envie de gagner tous les matches qui arrivent mais ce ne sera pas évident parce que ce championnat est serré. Nous le voyons avec les résultats étonnants de chaque week-end. Le moindre relâchement dans ce championnat se paie cash. À nous de rester vigilants et de progresser parce que si en terme de points, notre début de saison n’est pas mauvais, lorsque l’on regarde les performances individuelles, nous nous rendons compte qu’il y a une grosse marge de progression. Au shoot, le taux de réussite est faible.
De plus, avec les blessures, tu n’as pas pu compter sur tout ton effectif depuis le début de la saison..
Oui, nous avons joué de malchance et il y a eu des choses que nous ne pouvons malheureusement pas contrôler. Nous avons récupéré nos juniors de leur Mondial estival dans un état qui n’était pas excellent. Hugo DESCAT n’a toujours pas repris à ce jour, Adrien BALLET avait fait une petit e reprise mais finalement son coude pose problème. Jérémy TOTO vient de revenir. Antoine FERRANDIER s’est fait opérer d’un kyste. Ensuite, il y a Nedim REMILI qui s’est fait casser deux dents et qui a eu une opération pour une pose d’implant., qui est arrêté un moment. Ivan STANKOVIC a une entorse de la cheville. Dragan POCUCA a dû jouer 2-3 matches. Toutes ces blessures nous ont effectivement fragilisés mais nous avons su tenir le coup. Cela augure de bons moments au retour des blessés.
Lorsque Dragan était blessé, tu n’avais plus qu’un seul gardien (NDLR : Mate SUNJIC). Maintenant, Arnaud TABARAND revient de longue blessure. Comment gère-t-on cela ?
Nous avons été en difficulté sur le poste de gardien de but. Arnaud s’est fait opérer l’an dernier des croisés en avril dernier. Il ne reprend que cette semaine. Dragan POCUCA s’est fait opérer d’une infection au genou et nous avons évolué avec un seul gardien sur cette période là. Dans l’équipe réserve, il y avait également des blessures alors nous avons réussi à avoir de temps en temps Jérémy STOKI qui a joué avec nous à Angers. Il y a également Logan KHRISTENKO (-18, Pôle d’Eaubonne) qui est venu à Istres avec nous. J’ai aussi fait appel à un gardien du club de Maisons Alfort Guillaume TOLLEREP pour que l’on puisse jouer sur grand terrain à l’entraînement. C’était une période difficile.
Maintenant, avec le retour d’Arnaud, c’est une autre organisation lors des entraînements. Nous proposons un travail spécifique mais également une prise en charge des gardiens de but au cours des séances.
Revenons au championnat, tu as parlé des matches nuls. Un match a également été mis en question, celui contre Massy (NDLR : Créteil qui menait de quatorze buts à 15 minutes de la fin, a finalement gagné 34-30). Tu étais frustré et énervé après ce match, ce sentiment est passé ?
Contre Chartres, nous avons mené de douze buts, nous gagnons de six. Contre Massy, nous avons un différentiel de dix buts en un quart d’heure. Je ne pense pas que ce soit une question de physique défaillant. En comparaison avec d’autres matches, nous réussissons mieux les fins de match. Ces seuls deux matches où nous avons perdu le dernier quart d’heure sont lorsque nous avons mené de douze et quatorze buts à 15 minutes de la fin. Ce n’est peut-être pas uniquement lié à ça mais à mon sens, il y a une grosse part de psychologi(qu)e là-dedans. Avec les entraîneurs, nous nous battons pour que l’on ait un degré d’exigence plus élevé et que l’on maintienne ce niveau de concentration le plus longtemps possible.
Est-ce difficile d’apprendre à une équipe à gagner à nouveau ?
Je ne me pose pas ce genre de problématique. Je crois qu’aujourd’hui nous sommes dans la position d’une équipe qui joue le haut de tableau, le très haut de tableau même. Et la pression est là tous les matches parce que l’on doit gagner la plupart de nos matches. Cette pression était aussi présente l’an dernier parce que nous devions nous sauver. La pression est un peu différente mais toujours présente. Nous devons remonter et nous allons tout faire pour.
Ce week-end, tu l’as dit, Créteil est exempt, Mulhouse peut revenir à notre hauteur, Istres également. Cela fait trois semaines sans compétition. Comment as-tu géré cela ?
C’est une bonne chose parce que comme je l’ai dit, nous avons eu beaucoup de blessés. Cette période nous permet de faire souffler des joueurs sur lesquels nous avons beaucoup tiré, que nous avons beaucoup utilisés. Nous avons découpé cette période en plusieurs phases. La première a été celle du repos et de la récupération. La deuxième était portée sur l’affutement physique, le travail au poste, la relation avec le pivot, celle entre base avant et base arrière,… La semaine prochaine, nous préparerons le match de Bordeaux et nous ferons en sorte que les joueurs soient dans les meilleures dispositions physiques et psychologiques pour aborder cette première partie de deuxième phase du championnat. Nous avons atteint le quart du championnat et nous aimerions bien préserver notre invincibilité. Et pour ma part, j’aimerais bien voir les cheveux de Franck CHUPIN (NDLR : Entraîneur adjoint) encore pousser parce qu’il a dit que tant que nous serions invaincus, il les laisserait pousser. J’aimerais bien le voir avec une queue de cheval.
La phase retour risque d’être plus compliquée parce que nous allons nous déplacer à Mulhouse et à Billère notamment. Faudra-t-il être encore plus attentif ?
Oui mais je ne me projette pas aussi loin. Aujourd’hui, il nous reste encore cinq matches avant la trêve. Il faut que nous nous concentrions sur les rencontres à venir parce que chacun est difficile. Si nous arrivons dans de bonnes dispositions à la trêve, ce sera déjà une bonne chose.
Tu as évoqué les moins bonnes performances individuelles. Quels aspects positifs ressors-tu de ce début de championnat ?
Malgré un groupe amoindri auquel il manquait beaucoup de joueurs. Je pense à Jérémy TOTO, Adrien BALLET, Ivan STANKOVIC, Quentin MINEL a loupé certains matches, Antoine FERRANDIER, Hugo DESCAT et plusieurs autres encore. Malgré tout cela, nous sommes premiers et invaincus. Maintenant, en regardant les statistiques individuelles, notamment l’efficacité au tir, nous nous rendons compte que nous avons une grosse marge de progression. Il faut absolument que nous puissions évoluer sur le fait d’avoir le moins possible de temps faibles. Nous n’avons pas encore de match référence. Il y a toujours ces trous qui nous pénalisent dans un match.
C’est important cette notion de match référence ?
Pour moi, ça ne l’est pas plus que ça. Mais se dire que l’on peut être constant sur la durée et traverser ces périodes d’inefficacité au shoot par une grosse défense, c’est important.
Les réseaux sociaux, Internet en général permettent de donner son avis facilement. En ce qui te concerne, on te critique souvent sur ton coaching…
Oui, je suis pareil lorsque je regarde un match de foot à la télé, je n’y connais pas franchement grand chose mais je suis capable de voir aussi certaines choses. Au Palais des Sports, lorsqu’il y a un match, il y a beaucoup de spectateurs et chacun est en droit de donner son avis sur la question. Est-ce pertinent ? C’est encore autre chose. Maintenant, je crois que nous sommes en manque d’entraîneurs au club, chaque compétence est bonne à prendre. Tous ceux qui veulent entraîner, faire progresser nos jeunes joueurs sont les bienvenus. Je suis prêt à les rencontrer.
Comme on dit pour l’Equipe de France de Football, il y a 65 millions de sélectionneurs…
Ah, ça c’est évident. C’est la règle. Je ne m’offusque pas de ces commentaires là. j’essaie de faire mon métier du mieux possible. C’est un métier difficile mais passionnant aussi. Ce n’est pas quelques critiques qui vont m’arrêter.
Justement, tu en es à ta troisième saison en tant qu’entraîneur professionnel ici. Comment te sens-tu ? Et comment se passe cette nouvelle association avec Franck CHUPIN, désormais ton entraîneur adjoint et Christophe ESPARRE ?
Je suis très content d’être ici. J’ai commencé ici, je suis passé ar toutes les catégories. J’ai entraîné du Minihand jusqu’à l’équipe réserve, en passant par les -18 (NDLR : Champion de France). Après, pour moi il était important de partir, aller voir ailleurs comment je pouvais vivre de ma passion. Les expériences à Pontault-Combault et Vernon ont été bénéfiques. A Pontault, malgré le fait que je n’y sois resté qu’un an et que ça ne se soit pas très bien terminer avec certaines personnes, ce fut une expérience très enrichissante. A Vernon, j’ai vécu une de mes meilleures années d’entraîneur, dans un environnement propice au travail et à l’épanouissement aussi bien d’un entraîneur que des joueurs. Une année superbe avec des personnes formidables.
Et puis, ce retour à Créteil, en partant j’avais dans un petit coin de ma tête, cette envie d’y revenir. Je suis heureux d’être ici, je ne le suis pas d’être en deuxième division. C’est comme ça. Nous allons tout faire pour remonter.
La réorganisation du staff était nécessaire. Aujourd’hui, aussi bien avec Franck qui est l’entraîneur adjoint qu’avec Tito qui est le préparateur physique et qui s’occupe de la ré-athlétisation des blessés, chacun a pris son rôle à coeur et a trouvé sa place.
Les gens ne le voient peut-être pas parce qu’ils vous voient sur soixante minutes de match mais à l’entraînement en semaine, vous travaillez à trois…
Oui, nous sommes trois. Avec Franck, nous sommes sur le terrain, sur le spécifique “handball”. Aujourd’hui, Tito a beaucoup de boulot parce que nous avons pas mal de blessés. Il effectue un gros travail pour remettre les joueurs d’aplomb sur le plan physique avec un travail spécifique de motricité, d’aérobie et de musculation. Tout pour remettre le joueur le plus rapidement possible sur le terrain et dans de bonnes conditions.
Ce travail à trois me semble intéressant parce que chacun a trouvé sa place au sein de ce dispositif.
Franck s’en sort avec les vidéos ?
Oui, au début, il a eu du mal avec l’informatique. Au début, il a fallu lui expliquer ce qu’était un disque dur, une souris. Maintenant, il a trouvé son rythme de croisière. Il passe beaucoup de temps sur la préparation des matches. Je m’occupe de nos matches et les retours sur ceux-ci. Il commence à se familiariser avec l’outil informatique. Mais ce n’est pas son seul rôle parce qu’il est sur le terrain avec moi au quotidien. Et l’entente entre ce trinôme est très bonne.
Sur le banc, lors des matches, comment cela se passe-t-il ?
Avec Franck, nous avons défini un fonctionnement. Il est là pour m’apporter des indications tactiques ou physiques de certains joueurs. Si je ne vois pas qu’un joueur est un peu dans le rouge, il me le souffle à l’oreille. Ces informations sont importantes aussi pour moi. Christophe est dans les tribunes, il nous apporte un regard neuf. A la mi-temps, il nous rejoint dans les vestiaires avant que l’on intervienne auprès des joueurs et nous dit ce que lui a vu avec davantage de recul, pourquoi nous avons pris tels buts,… Cette analyse est intéressante.
En parlant de prendre de la hauteur, tu es un entraîneur qui accorde une grande place à la vidéo…
Oui, cela fait partie de mon travail. C’est de plus en plus un formidable outil. Je travaille sur Dartfish (NDLR : plateforme d’analyse et de montage des vidéos de matches). Cette année, j’ai davantage de temps pour me concentrer sur nos matches, voir ce qui a fonctionné, ce qui n’a pas fonctionné sur nos enclenchements, nos schémas défensifs. Chaque joueur peut avoir accès à son match, ses différentes situations dans lesquels il est acteur. Tout ce que l’on peut prendre en compte pour améliorer l’équipe est bon à prendre. La vidéo est quelque chose qui mérite que l’on y passe du temps.
Tu as quand même le temps pour tes activités extra-handballistiques ?
Oui, bien sûr. Avec Franck, nous avons le temps d’aller jouer au golf de temps en temps. Avec Gatien DUMARD (NDLR : Assistant de Gestion), c’est un excellent danseur de salsa aussi, nous avons le temps de nous faire quelques soirées de salsa.