Entretien exclusif avec Yannick Limer. USCHB.fr revient avec le pivot sur son avenir, ses projets, sa carrière,…
Yannick, tu as décidé de mettre fin à ta carrière de joueur de handball professionnel. De quoi ton avenir sera-t-il fait?
Pour le moment, de repos (rires). Après, j’envisage d’entrer dans le domaine du marketing, de la communication sportive voire évènementielle. Pour l’instant, c’est encore un peu vaste. Je prends un peu de recul par rapport à tout ça mais après je vais entamer les démarches qu’il faut.
J’ai donc décidé d’arrêter le handball. C’était officieux, c’est officiel. Mes proches étaient au courant. De toute façon, il était prévu que j’arrête en 2013. Maintenant, du fait que mon contrat n’ait pas été renouvelé et que j’ai eu des petits soucis de santé, c’était la meilleure décision, même si j’ai eu quelques propositions. Ce n’était pas en Division 1 spécialement donc j’ai décidé d’arrêter. Tout simplement.
Et tu t’orientes donc vers la communication sportive…
Oui. Dans un premier temps, je vais essayer de faire ça dans le handball puisque c’est le milieu que je connais le mieux. Mais me généraliser serait une bonne chose. Histoire d’étoffer ma palette. D’ailleurs si vous voulez m’aider, faites don de votre âme charitable (rires). J’ai quelques contacts mais en période de Jeux Olympiques, tout le monde est un peu pris. Je pense qu’en août, nous y verrons un peu plus clair.
Revenons sur cette longue carrière…
Oui, longue. 17 ans de handball, toutes à Créteil. J’ai côtoyé le groupe professionnel pendant 15 ans et dont douze années de professionnalisme.
Te souviens-tu de ton premier match?
C’était un mois de mai, contre l’ACBB. J’ai commencé avec Stéphane Crépin. Il avait marqué un but, moi non. Il faut dire qu’à l’époque, je jouais arrière. J’ai encore la photo à la maison.
Et tu es resté arrière combien de temps?
En fait, j’ai arrêté un an le handball en 1999. Et à mon retour, Thierry Anti m’a reconverti en pivot.
Tu as arrêté…?
Oui, j’ai arrêté. Mentalement, je n’étais pas prêt à m’engager à 18 ans, avec tous les sacrifices à faire. Je pensais davantage à voir les potes. Et quand je suis revenu, Thierry Anti m’a repris dans le collectif D1, en tant que défenseur. Je pense qu’il avait peut-être décelé en moi des petits talents de défense centrale (sourire).
Tu as longtemps été considéré comme l’un des meilleurs défenseurs de l’Elite…
Je ne sais pas si j’étais considéré comme tel mais en tout cas oui, je ne faisais que défendre. J’ai pris du plaisir. Et pour revenir à l’actualité, j’ai peut-être moins de plaisir et de motivation. Pas pour les matches mais pour les entraînements, tout ce qu’il y a à côté… Ma santé joue sûrement là-dessus mais j’ai moins la petite gnaque. Je n’ai que 32 ans mais cela fait 17 ans que je suis là-dedans. J’ai des propositions pour jouer avec des potes à des niveaux inférieurs mais à l’heure actuelle, j’ai du mal. Je leur ai dit “attendez, laissez-moi profiter de mes week-ends quand même” (rires). Et puis les déplacements en car, je ne suis pas spécialement prêt à tout ça.
Non mais j’ai envie de tourner la page. Je ne fais pas la gueule au handball mais j’ai vraiment envie de tourner la page.
Quel est ton meilleur souvenir de handballeur?
C’est très facile de répondre à cette question. Mon meilleur souvenir est notre victoire en finale de Coupe de la Ligue en 2003 à Besançon. Il y a également le match contre Pampelune. J’avais Jackson Richardson comme adversaire direct. Ce sont les deux grands moments. Je pense que nous pouvons ajouter la montée en Division 1. C’est quand même symbolique.
Cette montée a l’air d’avoir marqué les joueurs…
Oui, parce que franchement, une année en D2, quand tu sais que tu as le collectif pour évoluer en D1, ce n’est pas évident. Après, tu as ton amour propre, ton égo qui en prend un coup. La Pro D2 est un championnat très physique, et maladroit. Tu prends des coups que tu ne prendrais pas en D1. Et puis c’est toujours frustrant de voir tes potes évoluer en D1 alors que tu es en D2.
Si tu devais nous donner un de tes pires souvenirs, quel serait-il?
La descente en D2. Il y a aussi ma phlébite qui m’avait tenu éloigné des parquets durant neuf mois. Je faisais échographies sur échographies. C’est vraiment un mauvais souvenir.
Sinon, il y a eu Göppingen… Nous perdons en demi-finale de Coupe d’Europe pour un but. Nous avons marqué un but à la dernière seconde qui nous est finalement refusé pour un demi-pied dans les neuf mètres sur le coup-franc qui nous avait permis de gagner. C’est vraiment un mauvais souvenir, surtout qu’au match aller, nous aurions pu faire +6 ou +7. C’était également la fin d’un cycle, d’une belle équipe. Après Göppingen, beaucoup de joueurs sont partis.
Quel est le pire coéquipier que tu aies connu?
Humainement, je n’ai fait que de bonnes rencontres. Mais le plus barré, le plus loufoque, le plus fou et je pense que plein de gens me soutiendront, est sans aucun doute Anthony Pistolesi. Un fou furieux. Nous étions à l’extérieur et sur l’échauffement, il est allé jouer avec l’équipe de Toulouse à un tennis ballon. Et ça, c’était assez énorme. Ce jour-là, je me suis dit qu’il n’était pas net. Lors de ses contres-attaque, seul au milieu de terrain il arrivait à se faire rattraper aux six mètres adverses. C’est très marrant ça. Mais il va te dire qu’il avait la charrette derrière lui. Voilà je fais un petit coucou à Anthony (rires).
Quels sont les meilleurs coéquipiers avec qui tu as joué?
Je vais en oublier mais il y en a quand même pas mal… Je pense déjà à Guéric Kervadec, Fabrice Guilbert et Uros Mitrovic (qui pour moi sont les deux meilleurs demi-centres avec qui j’ai joué). Le bras le plus impressionnant est celui de Nérijus Atajevas, et Martin Valo, un slovaque.
L’une de mes plus grosses rencontres est Venio Losert. Cet homme, c’est vraiment la classe, à tous les niveaux. Ce joueur est hyper professionnel. Deux-trois mois après être arrivé, il parlait déjà français comme tout le monde. Je l’appelle Leonardo Di Caprio. A l’image du personnage, il est toujours propre sur lui après, pendant,… C’est la grande classe. Professionnalisme et simplicité malgré son impressionnant CV.
Sinon je pense que l’on va entendre parler d’Olivier Nyokas. Hugo Descat, je pense que pour lui c’est déjà pas mal. Techniquement à l’aile, je n’ai pas vu mieux. Benoît Henry est pas mal non plus mais Hugo au même âge est beaucoup plus fort. Jérémy Toto a un bel avenir s’il continue à travailler et qu’il prend confiance en lui.
Je pense que j’en oublie et je ne veux pas que mes potes me fassent la gueule. Il y a Vincent Moreno, Julien Portefaix, Marko Pavlovic, même en dehors de Créteil,…
Quand on parle de tes amis dans le handball, un nom vient en tête… Teddy Prat (joueur à Tremblay)…
Oui, Teddy est mon pote. A 38 ans, le mec est encore là. C’est une superbe amitié.
Il y a aussi Dougi Bojinovic avec qui j’ai super bien sympathisé au Jubilé de Guéric Kervadec.
Tu as été marqué par ce qu’il t’a dit à la fin de Montpellier-Créteil?
Venant d’un mec comme lui, oui. Même si je suis “proche de lui”, ça m’a marqué parce qu’il voulait vraiment que je continue. Je suis désolé si je l’ai déçu (rires). Malgré tout, cela m’a fait un peu réfléchir. Mais ma décision était déjà un peu prise.
Quel est l’entraîneur qui t’a le plus marqué?
Thierry Anti et Mile Isakovic. Thierry Anti est celui qui m’a lancé, qui m’a fait confiance à 17 ans. Il reste le numéro un des entraîneurs qui m’ont influencé. Quand j’étais en Juniors, Christophe Janot m’a beaucoup apporté. Et Mile Isakovic est celui qui m’a en poste 1, grâce à qui j’ai fini meilleur intercepteur du Championnat de France, dans les meilleurs défenseurs. Et humainement, il est quelqu’un de bien.
Après, les autres entraîneurs m’ont chacun apporté quelque chose. Dragan Zovko par sa rigueur, David Peneau avec ses blagues à deux balles (rires). Tu peux le chambrer comme un gamin de 15 ans, il va rétorquer, ce n’est pas un problème. Jean-Luc Le Gall est quelqu’un de plus réservé mais très humain aussi et droit. Benjamin Pavoni est un ami, c’est Benji, le gars qui me connait le mieux.
Avec qui tu aurais aimé joué?
Peut-être Teddy Prat en défense, pour casser des bouches (rires). Par contre, j’aurais bien aimé faire une équipe d’antillais avec Bruno Arive, Frédéric Louis, Jackson Richardson, Daniel Narcisse, Fabrice Guilbert, Teddy Poulin, Olivier Girault, Frédéric Bakékolo, Patrice Annonay, Didier Dinart. Et en coach, moi. Comme ça, j’apprécie.
Qu’est-ce qu’il va te manquer de plus?
La vie de vestiaire, je pense. L’adrénaline d’avant-match également. Je pense que les entraînements et les séances de musculation ne me manqueront pas du tout. La piste ne me motivait pas beaucoup non plus. Courir par 30°, c’était pas le top.