Alors qu’il est arrivé il y a huit ans à Créteil, le chemin qui a mené Guynel Pintor jusqu’au plus haut niveau n’a pas été sans embûche.
C’est une histoire qui commence en Martinique, il y a 32 ans. Le sport, le jeune Guynel baigne dedans. Il touche un peu à tout avant que son physique de costaud ne le porte naturellement vers le handball, un sport qu’avaient déjà pratiqué sa mère et quelques autres membres de sa famille. “J’aurais eu du mal à faire autre chose” rigole-t-il. Sa taille et ses capacités ne laissent pas insensibles les meilleurs clubs formateurs de métropole. Et à 14 ans, Guynel prend un aller-simple pour Sélestat. Un choix réfléchi, mais compliqué à gérer pour l’adolescent. “Ça a été dur pour ma mère, j’étais son ainé. Me laisser partir à l’autre bout du monde, c’était quelque chose. Mais elle m’a dit qu’elle croyait en moi et quelque part, j’ai eu de la chance” se souvient notre tour de défense. “Mon cousin était aussi dans les sélections de Ligue, et jamais sa mère ne l’a laissé partir.”
La maman, c’est un personnage central pour notre Bélier. Quand il arrive à Strasbourg, à 14 ans, le choc est compliqué à gérer. “Il neigeait, on ne voyait pas le soleil, je n’avais jamais mis une doudoune de ma vie, c’était la catastrophe. En plus, on n’avait pas le droit de sortir, c’était assez strict. J’ai tenu deux ans, mais j’ai craqué après” se souvient Guynel. Le mal du pays se fait violent, il pense à tout plaquer pour retourner en Martinique. Mais mieux, c’est la Martinique qui va venir à lui. “Ma maman est venu s’installer à Strasbourg. Jean-Luc Le Gall est venu nous voir, pour me convaincre de continuer, et ça a marché. Je ne serai jamais assez reconnaissant à ma mère d’avoir tout plaqué et d’avoir emmené mes frères pour venir m’aider.”
En Alsace, il restera jusqu’en 2014, avant de rejoindre le Palais des Sports. Déjà auréolé de la réputation d’un des défenseurs les plus costauds du championnat. Mais ceux qui ne connaissent notre tour de contrôle que depuis quelques années ne savent pas qu’à une époque, Guynel Pintor était une machine à marquer des buts. Coéquipier de Mathieu Grébille sur le poste d’arrière gauche dans les équipes de France jeunes, il se fait arracher le bras lors d’un tournoi international…“Je n’ai jamais récupéré la laxité de mon épaule. Au début, ça a été compliqué dans la tête de ne plus faire que de défendre. Mais le temps m’a permis de faire mon deuil de ça. Maintenant, j’ai un vrai rôle dans l’équipe et faut être honnête, mettre des taquets, j’adore ça !” Guynel éclate de rire, encore une fois.
Depuis huit ans, c’est donc lui qui protège les buts de nos gardiens. À 32 ans, n’avoir connu que deux clubs professionnels dans sa carrière, c’est rare. “Mais pourquoi changer quand on est bien ?” C’est donc le cœur d’autant plus lourd que le grand perdant de la NBA Fantasy de la saison quittera le club à la fin de la saison. “Je pars sur notre meilleure saison ensemble, avec un groupe sain, un entraineur qui a su tirer le meilleur d’entre nous et des super résultats. Je suis triste, bien sûr, mais c’est la vie” sourit-il. Ce n’est pas encore l’heure pour lui de penser à la reconversion – “Franchement, chauffeur poids lourds, parce que j’adore voyager, ça m’irait bien” -, mais plutôt de chercher un nouveau défi. Car la route n’est pas encore finie. “Quand je suis parti de la Martinique, jamais de la vie je n’aurais pensé avoir cette carrière, jouer avec les plus grands joueurs du monde tous les weekends. Ma mère est heureuse à Strasbourg, je kiffe ma vie de tous les jours, que demander de plus ?”